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Tribune en réponse à l’annulation des festivals en 2024

Retrou­vez la tri­bune et la liste des sig­nataires dans le Jour­nal du Dimanche : https://www.lejdd.fr/Culture/tribune-monsieur-le-president-aucun-festival-ne-doit-etre-annule-en-2024–4147173 (12/11/2022).

Lettre ouverte « Monsieur le Président, aucun festival ne doit être annulé en 2024 »

« Mon­sieur le Prési­dent de la République,

2024 sera l’an­née où la France accueillera les Jeux olympiques et par­a­lympiques (JOP). Ce sera l’oc­ca­sion pour des mil­lions de vis­i­teurs de venir décou­vrir notre pays. Ce sera aus­si un moment où la France, regardée par le monde entier, doit ren­voy­er son plus beau vis­age, celui d’une nation pos­sé­dant une his­toire incom­pa­ra­ble et en même temps totale­ment ancrée dans l’époque. Ce lien entre le passé, le présent et l’avenir, c’est d’abord notre richesse cul­turelle qui le per­met.

Or depuis quelques jours, nous sommes extrême­ment inqui­ets, car la cul­ture est en passe d’être la grande oubliée de ce beau tableau. En effet, le min­istre de l’In­térieur a demandé « le report de cer­tains fes­ti­vals » de l’été 2024 et sa col­lègue min­istre de la Cul­ture a par­lé de « cer­taines annu­la­tions si des solu­tions ne sont pas trou­vées ».

L’été, pour les Français­es et les Français, pour le monde cul­turel, et depuis des décen­nies, c’est le temps des fes­ti­vals. Fes­ti­vals de théâtres ou d’opéra, de musiques actuelles, tra­di­tion­nelles, baro­ques, de métal ou d’élec­tro, d’arts de la rue, de danse, de cirque… Plusieurs cen­taines ont lieu dans toute la France, y com­pris dans le monde rur­al, entre mai et sep­tem­bre. Les plus anciens datent de l’après-guerre, d’autres ont émergé récem­ment.

Les fes­ti­vals ne sont pas seule­ment essen­tiels à toute une économie locale, ils sont aus­si un temps évène­men­tiel, fes­tif et cul­turel, un temps de ren­con­tre et de lien social, qui fait la fierté des ter­ri­toires, des élus et des bénév­oles qui les accueil­lent et par­ticipent à leur organ­i­sa­tion. Ils sont aimés de nos com­pa­tri­otes et des touristes qui vien­nent du monde entier. Ils sont une part de notre iden­tité.

Ils per­me­t­tent aux pro­fes­sion­nels de tra­vailler et de mon­tr­er leur savoir-faire, aux artistes, aux musi­ciens, aux comé­di­ens, aux met­teurs en scène de se lancer et d’ac­céder par­fois à la renom­mée nationale ou inter­na­tionale. Ils génèrent un nom­bre con­séquent d’heures de tra­vail, si impor­tantes pour les inter­mit­tents du spec­ta­cle ain­si que pour de nom­breux saison­niers.

Nous, élus et pro­fes­sion­nels, con­nais­sons les con­traintes de la ges­tion de tels événe­ments. Nous savons aus­si que les moyens ne sont pas illim­ités, ceux de nos col­lec­tiv­ités au pre­mier chef. Nous sommes les pre­miers à com­pren­dre que l’or­gan­i­sa­tion d’un événe­ment de l’am­pleur des JOP va deman­der une infra­struc­ture de sécu­rité très impor­tante, et aus­si que les fes­ti­vals deman­dent à être sécurisés. Mais nous ne com­pren­dri­ons pas que notre pays, sep­tième puis­sance économique du monde, ne soit pas capa­ble en même temps d’ac­cueil­lir les JOP et de main­tenir l’or­gan­i­sa­tion de ces grands fes­ti­vals qui font une part majeure de la richesse cul­turelle de notre pays et de nos ter­ri­toires.

Quelle place don­ner­i­ons-nous donc à la cul­ture et à ses fes­ti­vals, dans notre pays, s’ils devi­en­nent une sim­ple vari­able d’a­juste­ment au gré de la disponi­bil­ité des forces de l’or­dre ? D’au­tant plus que les con­séquences de la crise san­i­taire se font tou­jours ressen­tir et que la crise énergé­tique men­ace égale­ment les lieux de spec­ta­cles.

Enfin, à l’heure où la cohé­sion de notre pays est sans cesse mise en cause, com­ment ne pas voir l’iné­gal­ité de traite­ment que représen­terait le fait qu’au moment où se déroulent les Jeux, pour l’essen­tiel dans la métro­pole fran­cili­enne, de nom­breuses régions français­es se voient privées de leurs ren­dez-vous cul­turels habituels ? Ce serait une faute majeure et incom­préhen­si­ble.

C’est pourquoi, Mon­sieur le prési­dent de la République, nous vous deman­dons de vous engager solen­nelle­ment à ce qu’au­cun fes­ti­val ne soit annulé en France lors de l’été 2024, et à ce que des solu­tions soient trou­vées et objec­tivées en lien avec les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales et l’ensem­ble du monde de la cul­ture.

Nous vous pri­ons de croire, Mon­sieur le prési­dent de la République, en l’as­sur­ance de notre haute con­sid­éra­tion. »